Actualités - Actu en bref

Bulletin de veille – Février 2022

L’actualité dans vos domaines 

Les données de recherche au cœur de la feuille de route stratégique d’ACS. Pendant les 5 prochaines années, ACS annonce vouloir mobiliser un budget de 50 millions de dollars dans 4 domaines différents, dont les données de recherche. Il est question de construire des infrastructures visant à améliorer la réutilisation des données primaires de recherche associées aux articles publiés dans les revues d’ACS et d’accélérer le développement du data mining. 

Les cahiers de labo électroniques, socles de données FAIR ? C’est le but de l’expérimentation menée par un groupe de chercheurs allemands, décrite dans un article du Journal of Biomedical Semantics. A partir du cahier de laboratoire open source elabFTW, les chercheurs ont extrait les informations importantes issues d’expériences sur le calcium (imagerie calcique). Dans un deuxième temps, les auteurs ont rassemblé les métadonnées issues du cahier de laboratoire électronique avec les données issues des instruments. Ils les ont ensuite compilées dans des fichiers en JSON requêtables. La solution proposée “augmente la découvrabilité en créant un lien entre les étapes expérimentales et les données”, écrivent-ils. 

Vers des données en catalyse de plus en plus FAIR ? C’est ce vers quoi tend le réseau britannique UKCH, dont l’une des actions relayées dans Catalysis Communications porte sur la création d’un portail indexant les données en catalyse, leurs auteurs et publications associées. Une fouille automatique réalisée via pdfminer et ChemDataExtractor au sein de 493 articles a permis de repérer 730 objets assimilables à des données associées aux articles. Dans un deuxième temps, le portail affichera un score permettant d’évaluer si le jeu de données est FAIR ou non. Selon les estimations des chercheurs, 56% des données signalées par le portail en construction ne sont pas structurées. Le réseau britannique de catalyse organise par ailleurs un webinaire le 1er mars pour recenser les besoins de la communauté en matière de gestion des données. 

Fraude scientifique : un professeur de chimie tchèque renonce à prendre ses fonctions de président d’Université. Alors qu’il s’apprêtait à diriger l’Université de Mendel, Vojtěch Adam, à la tête du département de chimie et biochimie, a dû faire machine arrière, signale le site Science Integrity Digest. Détenteur d’une bourse de l’ERC de plus d’1 million d’euros et affichant au compteur plus de 900 articles, le chercheur a été poussé à renoncer à ses nouvelles fonctions après la divulgation de pratiques non-éthiques, compilées dans un rapport d’investigation rendu public : manipulation d’images supposément prises par microscope, figures créées par Powerpoint, incapacité à fournir les références demandées issues des cahiers de laboratoire. La liste des allégations est longue. 

Réutilisation des données ouvertes en physique des particules. Grâce à la Politique sur l’Open Data adoptée par le CERN, les données produites dans les expériences du Grand collisionneur de hadrons (LHC), sont mises à disposition sur le portail CERN Open Data pour être ensuite réutilisées librement par les physiciens. Mais comment peut-on aussi rendre les données réutilisables ? C’est sur ce thème que s’articule la présentation de Clemens Lange, physicien des particules travaillant sur l’expérience CMS du CERN, lors de l’événement FOSDEM’22. L’équipe du projet CMS a mis à disposition plus de 2,5 pétaoctets de données sur le portail CERN Open Data, contenant des milliards d’événements enregistrés et simulés. Les données sont rendues disponibles régulièrement, après une période d’embargo de six ans à compter de l’acquisition des données. Pour les rendre réutilisables, l’équipe CMS fournit un guide servant de mode d’emploi. De plus, des ateliers sont organisés régulièrement pour expliquer comment accéder aux données et comment les analyser. Voici le lien vers la présentation en anglais.

IOP réforme le peer reviewing pour l’ensemble de ses revues en open access. Depuis le 1er février, IOP est devenu le 1er éditeur en physique à inscrire tout son portefeuille de revues en accès ouvert dans une logique de peer reviewing “ouvert”. En clair, l’ensemble des commentaires des évaluateurs seront mis à disposition en ligne, ainsi que les réponses des auteurs. 

La bibliothèque des sciences et des technologies de Leibniz à Hanovre signe un accord sur l’open access avec IOP. Au terme de cet accord, annoncé fin janvier et valable 3 ans, les chercheurs affiliés aux établissements d’enseignement supérieur et de recherche allemands pourront publier en accès ouvert dans plus de 70 revues. 

La Suisse signe de nouveaux accords sur l’open access avec les éditeurs en physique et sciences de l’ingénieur. Annoncée début février, une série d’accords vient d’être conclue afin de permettre aux chercheurs exerçant en Suisse de publier en open access dans les revues d’AIP, d’IOP et d’IEE. Les modalités varient d’une revue à l’autre : 140 articles par an environ pour AIP, aucune limite pour IOP et 44 articles par pour IEEE, avec transfert possible des jetons non-utilisés d’une année sur l’autre.  

Analyser les risques liés aux nanotechnologies grâce à des métadonnées collectées dans un cahier de labo électronique. Dans un article publié dans Particle and Fibre Toxicology, un groupe de chercheurs de l’Institut des nouveaux matériaux de Leibniz publie une proposition de schéma de métadonnées applicable au domaine de la sécurité des nanomatériaux. Le schéma se divise en 5 rubriques (information générale, matériaux, cible thérapeutique, exposition, informations issues des instruments et statistiques.) Implémenter ces métadonnées dans un cahier de laboratoire électronique permettrait de “minimiser le problème d’inaccessibilité des connaissances implicites”, signalent les auteurs, qui font référence à la fragilité des informations expérimentales lorsqu’elles ne sont pas systématiquement restituées. 

Evaluation de la recherche 

L’Appel de Paris sur la réforme de l’évaluation des chercheurs. La conférence européenne sur la science ouverte (OSEC) qui s’est déroulée les 4 et 5 février dans le cadre de la Présidence française de l’UE, a été l’occasion de poser une première pierre à l’édifice de la réforme de l’évaluation des chercheurs avec l’adoption de l’appel de Paris, préparé par les établissements français signataires de Dora. Le texte appelle à la création d’une coalition des agences de financement et des autorités d’évaluation afin de mettre en œuvre de nouveaux critères d’évaluation, distincts du nombre de publications et du facteur d’impact des revues. Il est notamment question d’ouvrir l’évaluation au “partage des résultats et des méthodologies de recherche chaque fois que c’est possible”. L’ensemble des interventions sont disponibles en replay depuis le 25 février.

Réforme de l’évaluation des chercheurs : 150 établissements mobilisés. Outre l’adoption de l’appel de Paris, la Commission européenne a signalé travailler avec 150 organisations européennes afin d’aboutir à des propositions concrètes. “Est-ce que l’on sous-évalue les résultats de recherche autres que les publications, tout en affaiblissant la capacité des chercheurs à collaborer ?” a lancé la commissaire européenne à la recherche Mariya Gabriel. “Nous devons commencer à agir.” En écho, le consortium ISE (Initiative for Science in Europe) qui rassemble une quinzaine de sociétés savantes (dont European Chemical Society et European Physical Society) vient de publier un rapport en ce sens. 

Edition scientifique

Publication des résultats négatifs : vers une réorientation de l’édition scientifique ? C’est l’un des axes de réflexion de la conférence de Paris des 4 et 5 février. Plusieurs intervenants ont soulevé la question des biais de publication, à l’instar de Tianjing Li, du département d’ophtamologie de l’Université du Colorado. Le fait de ne pas publier un résultat négatif pertinent « est un gaspillage des ressources de recherche », affirme-t-elle, estimant que « 12 000 essais cliniques qui auraient dû être publiés ne l’ont pas été ».

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Chérifa Boukacem, professeure en sciences de l’information à l’Université de Lyon 1, est quant à elle revenue sur les conséquences de la pandémie, qui a entraîné une prise de conscience chez les jeunes chercheurs. « La science doit avoir la possibilité de se tromper et de recréer le débat scientifique », a-t-elle fait remarquer.

Le modèle actuel de relecture par les pairs battu en brèche. Un article du Monde paru début février se penche sur le comparatif entre les articles de pré-prints et leur version finale, issu d’études publiées dans Plos Biology le 1er février (étude 1 et étude 2). Conclusion principale : très peu de différences observées, que ce soit sur le fond ou la forme. L’un des échantillons d’articles examinés montre que seuls 17% des manuscrits ont subi des modifications, ces dernières étant substantielles pour un seul article. Ces conclusions plaideraient en faveur de la généralisation de l’open peer review, estiment les auteurs. “Deux ou trois experts apportent moins de rigueur qu’une centaine. Mais c’est clair que nous avons besoin de meilleurs mécanismes de collecte et d’intégration des commentaires aux preprints.”  

“Le coût de l’édition est trop élevé.” Interrogé dans un podcast de Canal Académie en amont de la conférence sur la science ouverte des 4 et 5 février, le physicien Denis Jérôme, membre de l’Académie des sciences, revient sur les enjeux qui secouent l’édition scientifique. Saluant la prise de conscience européenne sur l’évaluation des chercheurs, encore trop fondée sur les aspects quantitatifs, il est également revenu sur les dérives qui affectent l’écosystème scientifique. “Le coût de l’édition est trop élevé”, constate-t-il, en raison des “bénéfices gigantesques” engrangés par les éditeurs commerciaux. “La recherche a besoin de crédits, il faut faire des économies sur l’édition.”  Le modèle diamant, fondé sur le financement par les établissements de l’ESR eux-mêmes, est “très vertueux”, estime-t-il, “mais il n’est pas sans poser de problème”, notamment en termes de pérennité. Revenant sur les disparités disciplinaires, Denis Jérôme, “optimiste” pour l’avenir, estime que les mathématiciens sont les plus conscients des enjeux qui secouent l’édition scientifique. 

Vers un soutien renforcé aux revues relevant du modèle diamant ? C’est le sens de l’annonce faite par des représentants de Science Europe et du Plan S à l’occasion de la conférence de Paris (OSEC). Le niveau de maturité est suffisant pour ”créer une communauté qui renforcerait le secteur diamant de l’open access”, a déclaré la secrétaire générale de Science Europe. 

Un annuaire de préprints au printemps 2022. C’est l’objectif du travail mené en tandem par le CCSD et la Confederation of Open Access Repositories. “Les chercheurs ne disposent d’aucun outil – sinon la connaissance des pratiques de leur communauté – pour choisir une plateforme où déposer leurs preprints en fonction de ses caractéristiques techniques et de critères plus éthiques relevant de la science ouverte”, peut-on lire dans un communiqué publié le 1er février. 

Institutions

Vers une ouverture plus large des données issues de projets de recherche en santé financés par le NIH. A partir du 25 janvier 2023, les chercheurs recevant des financements du NIH américain devront produire des plans de gestion et d’ouverture des données dès le dépôt de leur candidature à une demande de financement. Une perspective qui suscite maintes réactions parmi les chercheurs interrogés dans cet article publié dans Nature le 16 février. Pendant que certains s’inquiètent du temps passé à documenter et partager les données, d’autres s’interrogent sur le périmètre des contenus à ouvrir. “Les données collectées lorsque les expériences ne fonctionnent pas – et ne se retrouvent donc pas dans les publications – sont tout aussi importantes à communiquer, car elles comprennent des informations qui pourraient aider d’autres chercheurs à comprendre le contexte intégral de la réussite d’autres expériences”, indique une responsable du NIH. 

Remise des prix science ouverte du logiciel libre de recherche. Lancés dans le cadre du deuxième Plan National pour la science ouverte, les prix ont été remis à l’occasion de la Conférence européenne sur la science ouverte organisée les 4 et 5 février. Ont ainsi été récompensés : The Coq proof assistant (assistant de preuves mathématiques développé par l’Inria), Scikit-learn (bibliothèque d’apprentissage statistique de l’Inria), Faust (langage de programmation utilisé dans le domaine de la recherche en informatique musicale) et Gammapy, logiciel d’analyse des données astrophysiques.

Initiative européenne sur la souveraineté numérique. La présidence française de l’UE est aussi l’occasion d’engager une action en direction des “communs numériques”, basée sur “la maîtrise et la valorisation collectives des données et des infrastructures technologiques et sur une démarche ouverte”, peut-on lire dans un communiqué du ministère des affaires étrangères. Des propositions sont attendues en juin 2022. 

Baromètre Science Ouverte 2021 du CEA.  80 % des 5 375 publications scientifiques 2020 du CEA sont disponibles en accès ouvert. Un résultat en progression de plus de 12 points par rapport à l’ouverture des publications 2019, mesurée en 2020. Ce taux, supérieur à la moyenne nationale établi à 62%, varie cependant en fonction des disciplines. En biologie fondamentale, il atteint 89%. En sciences physiques et astronomie, il s’établit à 82%. D’autres disciplines, comme les sciences de l’ingénieur (54%) accusent un certain retard. L’archive ouverte HAL est la première plateforme utilisée pour le dépôt, avec plus de 2 000 publications déposées en 2020.

La feuille de route Science Ouverte 2025 de l’EUA. L’association des Universités européennes a publié sa feuille de route sur le thème de la science ouverte. Trois grandes priorités ont été retenues d’ici 2025 : libre accès universel et perpétuel aux productions savantes, données de recherche FAIR et évaluation de la recherche. 

Le Canada octroie plus de 260 000 euros à des infrastructures de science ouverte, comme ArXiv. Le réseau canadien de documentation pour la recherche versera 268 750 euros sur 3 ans, peut-on lire dans un communiqué, en guise de soutien à plusieurs plateformes telles qu’ArXiv  (serveur de pré-prints), Redalyc/AmeliCA (revues en accès ouvert) ou encore DSpace (logiciel libre d’entrepôt de données). 

Antoine Petit réclame plus de moyens pour le CNRS. Dans une interview au journal Le Monde publiée mi-février, le président du CNRS, qui entame un second mandat, livre quelques observations sur la situation du financement de la recherche en France. “Au niveau international, nous sommes le seul pays dont la dépense intérieure en recherche et développement stagne depuis vingt-cinq ans à moins de 2,2 % du PIB”, estime-t-il, appelant notamment à multiplier par 20 l’enveloppe budgétaire remise aux nouvelles recrues du CNRS pour faciliter la conduite de leurs travaux. 

Etudes et débats

Enquête sur le coût des pertes de données. Une enquête d’une trentaine de questions à destination des organisations et chercheurs vient d’être lancée par le JISC et Digital Preservation Coalition afin de mieux cerner le coût réel de la perte de données. Les informations recueillies seront utilisées pour entreprendre des recherches quantitatives et qualitatives en vue de la publication d’un rapport. 

Données de la recherche : quel partage ? C’était le titre de l’émission Grand Labo qui s’est tenue le 15 février sur Youtube. Le journaliste Mathieu Rouault propose une synthèse des échanges dans la dernière newsletter. “Il faut sortir du côté rébarbatif de la documentation des données”, estime Antoine Blanchard, consultant à Datactivist, qui promeut le développement des articles exécutables, permettant de rassembler en un seul et même contenu le manuscrit et le code permettant de comprendre la méthode des auteurs. 

Enseigner aux chercheurs à vulgariser leur savoir ? C’est ce à quoi il faudrait s’attacher, selon Pascal Chauchefoin, maître de conférences en économie et directeur scientifique du centre de médiation Mendès France à Poitiers. Auteur d’un article publié le 21 février dans The Conversation, il revient sur la défiance croissante des Français à l’égard de la science. “Malheureusement, en France, l’enseignement des principes et des méthodes de la médiation n’est pas systématiquement intégré dans la formation des chercheurs et enseignants-chercheurs. Seules quelques universités comme Rennes 1 et Paris le proposent dans les formations doctorales”, observe-t-il.

En 10 ans, le nombre de chercheurs en entreprise a bondi. On dénombre plus de 282 000 chercheurs dans le secteur privé en 2019, contre  184 000 en 2010, soit une augmentation de 54%, indique une note du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, publiée en février. Parmi les disciplines représentées, les sciences de l’ingénieur, les mathématiques et l’informatique, loin devant la chimie et la physique. 

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